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Les jumelages interculturels se sont multipliés depuis 12 ans, touchan


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Dix mille jumeaux

Les jumelages interculturels se sont multipliés depuis 12 ans, touchant quelque 10 000 étudiants.

10 MARS 2014 À 16H47

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Yayu Guo, étudiante au certificat en français écrit pour non-francophones, avec Frédéric Yelle St-Louis et Charles Cody, étudiants au baccalauréat d'intervention en activité physique, profil enseignement.Photo: Nathalie St-Pierre.

Chaque trimestre, environ 500 immigrants s'inscrivent au certificat en français écrit pour non-francophones. La provenance de ces étudiants varie selon les vagues d'immigration, mais on y retrouve essentiellement des natifs d'Amérique latine, de Chine, d'Europe de l'Est, et, dans une moindre mesure, du Moyen-Orient. «Le projet de jumelages interculturels est né d'une conversation avec la maître de langue Gladys Benudiz, à l'époque responsable de ce certificat, qui déplorait l'absence totale de contacts significatifs de ses étudiants avec des Québécois», se rappelle Nicole Carignan. La professeure au Département d'éducation et formation spécialisées, qui donnait à de futurs enseignants les coursÉducation et pluriethnicité au Québec et Problématiques interculturelles à l'école, y a vu une belle occasion de collaboration aux bénéfices mutuels.

Les immigrants inscrits au certificat en français écrit pour non-francophones de l'École de langues sont des professionnels – médecins, ingénieurs, journalistes, psychologues, etc. – qui veulent apprendre le français pour passer les examens des ordres professionnels ou pour retourner à l'université, précise Nicole Carignan. «Mes étudiants sont catholiques, blancs, originaires de la banlieue et ils n'ont pas beaucoup expérimenté la pluriethnicité, ajoute-t-elle. Or, ils auront à enseigner à des enfants d'immigrants et ils auront à côtoyer des personnes provenant d'autres cultures dans le cadre de leur travail. Il leur est grandement profitable d'entrer en contact avec des immigrants, lesquels peuvent en retour améliorer leur français et en apprendre davantage sur la société québécoise.»

Le premier projet pilote, en 2002, a réuni 70 jumeaux et jumelles – c'est ainsi qu'ils sont désignés. «Gladys avait 35 étudiants dans sa classe, alors que j'avais trois classes de 50-60 étudiants. J'ai offert à 35 volontaires de s'inscrire au projet, se rappelle Nicole Carignan. Je n'ai pas eu de difficulté à les recruter.» Le deuxième jumelage, au trimestre suivant, a réuni 128 jumeaux et jumelles. Les étudiants devaient se rencontrer en dehors du cours et rédiger ensuite ce qu'ils retenaient de l'expérience. «Dès le départ il était clair que les objectifs étaient arrimés aux contenus de nos cours respectifs», précise la professeure.

L'expérience fut un succès. «Plusieurs ont remarqué qu'aux premiers contacts, ils ne voyaient que des différences avec leur jumeau/jumelle, mais qu'avec le temps, ils ont plutôt noté des ressemblances et des valeurs communes, souligne la professeure. Ils prennent aussi conscience des défis de l'immigration et des sacrifices que cela demande. Ils laissent rapidement tomber leurs préjugés et sont impressionnés par le parcours de ces immigrants, dont le français est parfois la troisième, quatrième ou même cinquième langue! Ce genre de projet change les conceptions erronées, réduit le sentiment de menace identitaire et augmente le sentiment de sécurité linguistique.»

Les immigrants profitent en retour de l'expérience pour poser des questions sur la société, la culture et le système scolaire. Ils veulent comprendre le cheminement de leur enfant à l'école, savoir décoder les bulletins et interagir avec les enseignants, ont souligné les étudiants de Nicole Carignan.

Un passage obligé… et apprécié!

À la demande générale, le projet est devenu obligatoire dès l'année suivante. Douze ans plus tard, ce sont tous les futurs enseignants du primaire et du secondaire – toutes disciplines confondues – qui participent aux jumelages. La formule retenue prévoit quatre rencontres d'une heure et demie en dehors des heures de cours. «Les jumeaux et jumelles décident eux-mêmes du moment et du lieu, précise Nicole Carignan. Certains se voient plus longtemps, d'autres plus souvent.»

«Les jumelages interculturels offrent, autant aux Québécois francophones qu'aux nouveaux immigrants, l'occasion de développer leur sensibilité, leur empathie et leurs habiletés de communication interculturelle. Et les immigrants font des progrès fulgurants en français, même en l'espace de quatre rencontres!»

NICOLE CARIGNAN

Professeure au Département d'éducation et formation spécialisées

Les principes qui guident ces rencontres sont simples: réciprocité, coopération et égalité. «Les participants ont le même statut – il n'y a pas de paternalisme envers les immigrants, précise la professeure. Il s'agit d'un échange où chacun a quelque chose à offrir et a quelque chose à apprendre.»

Le projet, qui a touché plus de 10 000 étudiants depuis le premier jumelage, a remporté un prix de la Fondation canadienne des relations raciales, en 2005, et a valu à Nicole Carignan la Médaille du jubilé de diamant de la reine Elizabeth II en 2012 – une distinction décernée à des citoyens qui ont apporté une contribution significative à leur communauté et leur pays. «Les jumelages interculturels offrent, autant aux Québécois francophones qu'aux nouveaux immigrants, l'occasion de développer leur sensibilité, leur empathie et leurs habiletés de communication interculturelle, explique la professeure. Et les immigrants font des progrès fulgurants en français, même en l'espace de quatre rencontres!»

Quelques projets nés dans la foulée…

«Depuis quelques années, j'ai vu des jumeaux/jumelles de l'École de langues qui sont devenus des étudiants en éducation, souligne fièrement Nicole Carignan. C'est la beauté du projet: les immigrants d'aujourd'hui seront les membres de la société d'accueil de demain.»

L'une des étudiantes de Nicole Carignan, Véronique Fortier, a participé aux premiers jumelages. Elle a eu la piqûre pour l'interculturel, a fait une maîtrise sur le sujet, puis un doctorat. Elle a participé à l'organisation des jumelages à titre de maître de langue à l'UQAM, puis est devenue professeure au Département de didactique des langues l'an dernier. Elle poursuit l'expérience des jumelages avec ses étudiants… et les étudiants de celle qui l'a remplacée à l'École de langues!

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Amel Belhassen, chargée de cours au Département de sociologie, Nicole Carignan, professeure au Département d'éducation et formation spécialisées, et Myra Deraîche, maître de langue.Photo: Nathalie St-Pierre.

Une autre étudiante, Maria Elena Zapata, a réalisé sa maîtrise sous la direction de Nicole Carignan et a mis sur pied un projet de jumelage avec des étudiants hispanophones de l'École de langues, dans le but de faire travailler leur espagnol aux étudiants en communication qui le désiraient.

En psychologie, une centaine d'étudiants sont jumelés chaque année avec les étudiants de trois groupes de l'École de langues. Ils procèdent à une seule rencontre pendant un cours, où ils discutent de leur parcours respectif. D'autres projets semblables ont vu le jour en didactique, en carriérologie et en travail social.

Il y a même un ancien étudiant de Nicole Carignan, devenu enseignant, qui répète l'expérience des jumelages dans son école avec la classe d'accueil. «Il voyait que les élèves de la classe d'accueil était relégués à une salle de classe à l'écart, selon un horaire différent des classes régulières, et il a voulu mettre sur pied un projet favorisant l'intégration de ces élèves», note Nicole Carignan.

suite et source : http://www.actualites.uqam.ca/2014/4426-jumelages-interculturels-education-ecole-langues?utm_source=twitterfeed&utm_medium=twitter

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