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Choc culturel : Ici, on m’a dit : “Montre-moi ce que tu sais faire”


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À Montréal, on les appelle « les Français de France ».

Mais comme dans n’importe quelle famille, les rapports ne sont pas toujours simples. Québécois et Français ont parfois l’air de deux peuples séparés par une langue commune.

Louis Myard, étudiant en sciences politiques à l’Université de Montréal, se dit parfois qu’« un Mexicain et un Chinois ont plus de choses en commun qu’un Français et un Québécois ».

Sans compter, poursuit le jeune homme de 22 ans, que pour ses compatriotes élevés dans le « machisme » français, l’amour n’est pas toujours facile au Québec, avec sa culture féministe.

« On m’a regardé de travers parce que j’ouvrais la porte à une femme et parce que j’ai déjà appelé une Québécoise que j’aimais bien “mon petit bébé”, se rappelle-t-il. Très énervée, elle m’a répliqué : “Je suis pas ton bébé!” »

Salomé Zimmerlin, mannequin française à ses heures, venue étudier en économie à l’Université McGill, raconte pour sa part qu’elle a été interloquée la première fois qu’elle a entendu des Québécois tutoyer de parfaits inconnus, quoiqu’elle ait vite accepté cet usage.

Elle a aussi été étonnée par certains mots québécois comme « ma blonde », qui désigne une petite amie… quelle que soit la couleur de ses cheveux.

La jeune femme de 23 ans, qui est aussi dessinatrice de mode et qui a lancé sa propre marque de mode unisexe, « Kafka », ajoute toutefois que le choc culturel ne pèse pas lourd dans la balance face aux attraits d’une société beaucoup moins rigide que la France et sa culture hiérarchique.

« Si j’avais voulu lancer une marque de mode à Paris, on m’aurait ri au nez à cause de mon manque d’expérience, assure-t-elle. Ici, on m’a dit : “Montre-moi ce que tu sais faire.” »

Mais les temps ont changé : Le Monde a d’ailleurs qualifié le Québec d’« eldorado » pour une nouvelle génération de Français attirés entre autres par un faible taux de chômage (environ 5,5 % dans la province contre plus de 9 % en France) et par quelques avantages reconnus par les règles d’immigration aux personnes qui savent parler et écrire en français.

Alors que les Québécois ont longtemps cherché l’inspiration du côté de la France des Lumières, Gérard Bouchard, éminent historien et sociologue de l’Université du Québec à Chicoutimi, précise que lorsqu’ils « ont commencé à prendre conscience de leur identité propre dans les années 1960, ils se sont de plus en plus définis en fonction de l’Amérique du Nord, et non plus de la France ».

« Ici, je peux trouver un bon boulot, devenir propriétaire, être proche de la nature et avoir une bonne qualité de vie… et tout ça en français », explique Adeline Alleno, une Parisienne de 29 ans, pour conclure : « J’en veux à la France de m’avoir laissée tomber. »

 

Extraits du texte intégral de Dan Bilefsky pour le New York Times

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