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Hawaiienne54 en finale du Grand Prix‏


dentan

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  • Habitués

L'oeuvre J'ai oublié ma brosse à dent de Hawaiienne54 est qualifiée pour la finale du Grand Prix printemps 2014.

Les compteurs de votes sont remis à zéro.

Si vous voulez continuer à soutenir cette oeuvre, lisez, votez et partagez... en suivant le lien !

C’est un samedi de printemps, le 20 avril très exactement. Le ciel gris nous envoie des flocons de neige, comme pour nous rappeler que ce jour est différent. C’est le jour où j’ai pris la décision la plus folle et la plus impulsive de ma vie, la décision la plus sage, la plus humaine, la meilleure des décisions.
Mon amoureux me laisse là, devant l’aéroport de Montréal, seule, face à...l’enfer, la peur, la maladie. Mes mains tremblent, les larmes coulent, le cœur me débat. Je viens de laisser mes trois enfants, je viens de planter ma vie là. Je vole au secours de ma maman. Le reste ne compte pas. Comme un automate, je passe la douane, l’embarquement, je me fais contrôler mes papiers, les passagers me regardent bizarrement : qui est cette jeune femme, seule avec un petit sac, les yeux rouges, complètement déconnectée ? J’envoie des derniers messages aux proches, expliquer l’inexplicable...Quand l’avion quitte le tarmac, que je vois mon chez moi s’éloigner, le déchirement entre quitter les miens et rejoindre les miens, quand l’avion monte au dessus de la neige, des nuages, le soleil éclaire mon cerveau. Il avait raison mon amoureux, je suis capable, je vais affronter ça, de nouveau... Parce que c’est là... C’est maintenant... Je n’ai pas le choix.
Deux jours plus tôt tel un cataclysme le diagnostic de leucémie aïgue myéloblastique a anéanti tout autour de moi, mes repères s’effondrent. La nouvelle m’a été apportée depuis Toulouse par mon frère, maman est dans l’ambulance, direction Nancy, à l’autre bout du monde... Il me dit « LAM ». Il sait qu’il n’a pas besoin de me donner plus de détails, il sait que je sais. Pendant deux jours je pleure, tout ce qu’il est possible de pleurer, je ne veux ni voir ni parler à personne, je suis pendue au téléphone, avec maman, avec papa, je leur dis que je suis là, mais... Je ne suis pas là... Je suis loin... Je les vois s’effondrer, je ne peux rien faire... Je n’ai même pas envie de hurler, rien ne sort de moi à part des larmes.
Huit mois plus tôt, Marie-Thaïs, un peu avant l’aube de ses trois ans, Marie nous a quitté. Une leucémie l’a emportée. J’avance avec peine avec ce deuil là, l’enfant de mes amis leur a été arrachée... C’est insupportable chaque jour qui passe... Je vois la maladie, je vois la souffrance, je vois la mort, je cherche l’espoir, je le cherche dans les mots de ma maman, mais... Tout est trop grand, trop fort, trop difficile, l’espoir se cache.
La leucémie vient de me foutre par terre. Alors que je commençais doucement à me relever.
Je regarde mes enfants...comment trouver les mots pour les rassurer. Il n’y a pas de mot. Je revois Mathilde, ma fille aînée, aux soins intensifs, avançant courageusement vers son amie Marie-Thaïs, la berçant, l’apaisant... Elle sait. Je revois les cris désespérés de Lilian, mon gars, quand Marie est décédée... Il sait. Je revois mon Guigui, mon petit, à genoux devant le petit corps sans vie de son amoureuse, lui tenant la main, sur son visage un air grave, il vient d’avoir huit ans... Et il sait. Que leur dire?
Deux jours d’errance, pas de sommeil, une espèce de survie, l’impression de ne pas être à ma place. C’est mon amoureux qui me donne le feu vert, c’est lui qui me pousse. Nous venons de le vivre avec Marie, nous savons que tout est si fragile, nous savons qu’il faut savourer chaque seconde, j’ai l’impression que jamais je n’aurai la force de vivre cela encore, je suis encore si fragile, si triste. Mais je sais que je dois y aller, je le sais, j’attendais juste son accord, il me donne bien plus que ça.
La décision est prise : je veux un vol le plus rapidement possible pour la France, mon pays, là où sont les miens. Une heure plus tard je suis en route vers l’aéroport, à peine le temps de serrer mon amie, la maman de Marie, de la serrer très fort, à peine le temps d’essayer de rassurer ma fille effondrée, à peine le temps de faire un câlin à mes deux gars, j’ai l’impression d’abandonner mes enfants là, je laisse tout en plan là.

J’emporte Marie-Thaïs, j’emporte son courage, j’emporte sa force. Je réalise que tout ce que j’ai vécu auprès d’elle, auprès de ses parents, tous ces moments si heureux, tous ces moments si terribles, tout cela a fait que j’ai trouvé la force, les mots, la compréhension, l’amour pur, auprès de ma maman. L’amour est au dessus de la maladie, Marie m’a appris cela, elle me l’a montré. Elle avait toujours un sourire, dès que la douleur disparaissait elle vivait chaque instant, elle le savourait avec un beau sourire. Marie m’a aidée, comme chaque jour depuis son départ, elle m’a aidé à pousser de nouveau les portes de l’hôpital, à mettre sous mon masque stérile un sourire, à être pleinement, totalement, fusionnellement auprès de ma maman.
Quand l’avion se pose, il faut passer encore les barrières, montrer ses papiers, je ne sais plus quelle file prendre, canadienne ou française? La fatigue et le déphasage aidant, je peine à trouver mes mots français, je suis concentrée sur d’autres choses. Commence de nouveau l’attente, le train... Je m’endors, épuisée, je m’endors enfin, très peu de temps, le train est arrivé... Mon cœur cogne fort. Je le vois, mon papa sur le quai. Il tient debout je ne sais comment. Je le vois, je m’approche, je me réveille, il est là et... Il s’effondre dans mes bras, sur le quai, dans la bruine lorraine, je porte mon père. La meilleure des décisions, je le réalise à ce moment là. Mon papa a besoin de moi. Je réalise aussi qu’à l’annonce de mon arrivée, le moral de maman a repris un petit « boost », sa fille s’en vient! Je vais les porter, la fatigue est balayée, je suis à ma place, je suis prête à affronter tout ce qu’il faudra affronter, je le ferai, et je vais vivre chaque seconde à leurs côtés.
Les routes sont petites, les panneaux sont petits, les autos sont petites, je suis encore décalée. Je veux courir dans sa chambre. L’ascenseur, se vêtir (blouse et masque), elle est derrière la porte, se désinfecter les mains... La maladie te rappelle à chaque instant qu’elle rode. Entrer. La serrer. Je ne sais si c’est le choc, la fatigue ou la force, mais, il n’y a plus rien qui sort de moi, plus de larmes, juste de l’amour, de la présence. Les larmes ne couleront pas pendant ces 11 jours auprès d’elle. Ça ne sort plus, je suis... Sèche.
Le bal des médecins, les annonces des traitements, il faut analyser, intégrer, comprendre, apprendre, et surtout ne pas regarder loin, surtout pas, c’est décourageant de regarder loin. Deux ans de traitement, détruire la moëlle, consolidation, greffe de moelle... Je connais la route, Marie a parcouru le même chemin. Je suis terrorisée.
Mon frère décide lui aussi de venir nous rejoindre, pour que l’on soit tous les 4 réunis avant l’entrée en chambre stérile où les visites ne sont plus qu’une seule à la fois. Il arrive dans deux jours, il me dit que... Je suis incroyable. Je suis juste la fille de mes parents, je ne pouvais pas faire autrement que d’être là, c’était insupportable d’être loin. Alors nous serons réunis, parce qu’ensemble... On est plus fort.
Mes amis se serrent les coudes autour de moi. Ils sont mon pilier.
Ça fait deux fois que le cancer l’attaque, il y a 10 ans, elle a eu un cancer au sein, ablation totale du sein avec curetage, chimiothérapies et radiothérapie, puis reconstruction. Elle sait... Elle sait ce qui l’attend. Elle sait que ce sera encore plus dur. Il y a 10 ans, prise avec mes bébés, je n’avais pas cette maturité, cette connaissance, cette sérénité. Je l’ai accompagnée tout croche sans trop comprendre ce qui se passait. Il y a 10 ans, l’espoir était immense. Là, la donne est différente, il est partout, partout dans son corps. La peur est immense. Elle s’est battue comme un soldat contre la maladie déjà, et la montagne devant elle lui semble tellement immense. Pour la première fois de ma vie, à ce moment pour la première fois je comprends ma maman. Elle est démunie face à tout cela, terrorisée, chaque étape est angoissante, et je comprends tout. Elle doit se résigner. Se résigner à cette maladie, se résigner à entrer en soins. Tout va très vite, à peine le temps d’intégrer les informations, les soins avancent déjà. Elle a tellement de questions et d’angoisse, la peur de ne pas être à la hauteur, la peur de nous montrer une image de déchéance, la peur d’avoir mal, la peur de tout. Je comprends cette peur et je lui assure que je peux TOUT entendre. Marie m’a donné cette force là, elle a trouvé ça au fond de moi. Il n’y a rien que je ne puisse faire. Je serai là quoi qu’il arrive et quoi qu’elle décide, je ne jugerai pas, car c’est son corps à elle, je respecterai ses choix, quels qu’ils soient.
Le soir venu il faut rentrer. La maison de mon enfance. Vide. Froide. Mon père qui... Tournicote, brasse, pleure, incapable de se poser, enchainé à son téléphone. Il ne vit plus. Il mange parce qu’il le faut sans appétit, il dort peu, et survit pour les quelques heures qu’il passe avec elle chaque jour. Tout ce qui se passe en dehors de la chambre d’hôpital ne compte pas, ne compte plus.
Le soir venu il faut réaliser que... J’ai oublié ma brosse à dent.

suite et source :

http://short-edition.com/oeuvre/nouvelles/j-ai-oublie-ma-brosse-a-dent?utm_source=notifications&utm_medium=mail&utm_campaign=Template+26

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  • Habitués

Super initiative Dentan et très bonne nouvelle pour Hawaïenne !

Voilà j’ai voté !!

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  • Habitués

waou je vous remercie vraiment, Dentan, merci merci merci!

J'ai fini en tête des selections avec 205 vots et plus de 2300 lectures, des dizaines de messages plus émouvants les uns que les autres.
Si vous saviez, si vous saviez comme les yeux de ma maman petillent de bonheur en voyant la réaction des gens!!!!!! Elle embarque, elle partage, vous lui donnez le sourire!!!!!!

Pour ceux qui suivent le blog, les bilous vous reservent une "petite" surprise dans la soirée heure de Montreal ou demain...

sans les autres on est rien, merci à tous ceux qui me soutiennent...

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  • Habitués

waou je vous remercie vraiment, Dentan, merci merci merci!

J'ai fini en tête des selections avec 205 vots et plus de 2300 lectures, des dizaines de messages plus émouvants les uns que les autres.

Si vous saviez, si vous saviez comme les yeux de ma maman petillent de bonheur en voyant la réaction des gens!!!!!! Elle embarque, elle partage, vous lui donnez le sourire!!!!!!

Pour ceux qui suivent le blog, les bilous vous reservent une "petite" surprise dans la soirée heure de Montreal ou demain...

sans les autres on est rien, merci à tous ceux qui me soutiennent...

Salut,

De rien, cela m'a fait plaisir! Ce que j'ai publié était beaucoup plus facile à faire que d'écrire ton excellent texte!

Je n'arrive à trouver quand les votes ferment!

À 09h17 tu as 95 votes!

Donc tout le monde allez voter svp!

Modifié par dentan
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  • Habitués

1 J'ai oublié ma brosse à dent 131 votes

Donc ''La cafetière d'Adèle'' s'approche dangereusement!

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  • Habitués

Si vous aimez n'hésitez pas à partager dans vos contacts et les inviter à voter. J'ai créé une page Facebook aussi qui s'appelle :"j'ai oublié ma brosse à dent", la finale sera serrée pour la première place!

Merci à vous tous.

Je voulais partager avec vous une belle nouvelle : mes parents sont là pour deux semaines!!!Nous avons fait la surprise aux enfants et c'était très émouvant !

La vidéo est sur le blog des bilous!

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  • Habitués

Un vote supplémentaire pour ce magnifique texte !

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  • Habitués

Merci vraiment, la finale est très très serrée, rameutez vos contacts !

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  • Habitués

A voté et j'ai aussi mis le lien sur ma page Facebook ! :thumbsup::flowers:

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