Aller au contenu

Messages recommandés

  • Habitués
Posté(e)

Ah tiens petite histoire drole (et vécue) à propos de ma mère voulant que je lui ramène un beau bucheron canadien. Justement !

Mes parents sont venus me voir il y a deux ans maintenant. Le lendemain après une petite visite des lieux, et voyant que ça fatiguait un peu dans les rangs, je leur propose :

- "allons prendre un café chez Tim".

- Ma mère aux anges : "ah oui Tim, c'est qui ? Ton nouveau petit copain ??"

Moi me dirigeant vers les lieux tout sourire, je ne dis rien... (ne gachons pas mon plaisir)

- Ma mère insistante un peu (limite gonflante meme quand elle a décidé de me caser avec tous les hommes de 18 à 40 ans qu'elle croise) : "mais c'est quoi son nom de famille à ce Tim"

- Moi : "ah Tim Horton's qu'il s'appelle, typiquement d'ici tu vas aimer ! On ne peut pas faire plus canadien que ça !"

- Ma mère frétillant sur place : "oh un nom qui sonne anglais, chéri va falloir qu'on se mette sérieusement à l'anglais. Pour parler ça va pas être facile, mais j'ai encore quelque reste de mon anglais du collège"...

Vous ne pouvez imaginer la tête de ma mère quand on est arrivé devant le Tim Horton's et que je lui ai dit, "voilà on est arrivé chez Tim" et qu'elle a vu l'enseigne en gros "Tim Horton's" :rofl:

Elle faisait la gueule, la pauvre :D

Mais c'était tellement drole !!! :lol:

Excellent :thumbsup::lol:

  • Habitués
Posté(e)

Le jeune bucheron tu ne le trouveras pas dans les rues de Montreal , da'illeurs a ce propos j'ai passe 2h lundi a afuter deux haches. Mais suis-je bete, je ne suis ni bucheron, ni jeune :rolleyes: .. et plus libre. Pas de bol :tongue:

Ton texte est sympa a lire. Les hauts les bas, oui on les a la premiere annee surtout loin de tout. Cela fait partie du package "immigration". Tu ne peux partir loin de ta famille sans devoir en payer un peu le prix. Celui qui part sans avoir cela en tete il risque de fortes surprises. JE ne ferai pas mon bilan de la premiere annee, elle est passee tellement vite. D'ailleurs j'ai du mal a me rendre compte que cela fait un an que je suis ici ... et que dans 2 mois je revois ma gamine a Montreal. Cela fera un an que je ne l'ai pas vue. On verra si ma seconde annee ressemble a la tienne :biggrin:

  • Habitués
Posté(e) (modifié)

Le jeune bucheron tu ne le trouveras pas dans les rues de Montreal , da'illeurs a ce propos j'ai passe 2h lundi a afuter deux haches. Mais suis-je bete, je ne suis ni bucheron, ni jeune :rolleyes: .. et plus libre. Pas de bol :tongue:

Ton texte est sympa a lire. Les hauts les bas, oui on les a la premiere annee surtout loin de tout. Cela fait partie du package "immigration". Tu ne peux partir loin de ta famille sans devoir en payer un peu le prix. Celui qui part sans avoir cela en tete il risque de fortes surprises. JE ne ferai pas mon bilan de la premiere annee, elle est passee tellement vite. D'ailleurs j'ai du mal a me rendre compte que cela fait un an que je suis ici ... et que dans 2 mois je revois ma gamine a Montreal. Cela fera un an que je ne l'ai pas vue. On verra si ma seconde annee ressemble a la tienne :biggrin:

Comment ca je trouverais pas de bucheron a Montreal ??? M'aurait-on menti ??? (bon deja que j'ai été décue quand j'ai pas vu de caribous !)). Attends, j'en ai vu un l'autre jour avec sa chemise rouge a carreaux... je l'ai pas accosté, trop vieux ! :ph34r:

J'imagine qu'a Kuujjuaq, ca doit pas etre facile non plus ? Ça fait une trotte tout de meme... Et un papa qui n'a pas vu sa fille depuis un an, ouf que ça doit pas etre facile tous les jours... L'hiver doit etre bien long aussi !!!

Y'a une blague sur ca d'ailleurs : "les habitants de Kuujjuaq commencent a etre tanné de l'hiver arrivé au mois de juillet" :rofl:

Modifié par laureenfr
  • Habitués
Posté(e)

Y'a une blague sur ca d'ailleurs : "les habitants de Kuujjuaq commencent a etre tanné de l'hiver arrivé au mois de juillet" :rofl:

Ah bon, il etait parti avant ??

  • Habitués
Posté(e)

J'imagine qu'a Kuujjuaq, ca doit pas etre facile non plus ? Ça fait une trotte tout de meme... Et un papa qui n'a pas vu sa fille depuis un an, ouf que ça doit pas etre facile tous les jours... L'hiver doit etre bien long aussi !!!

Tout depend des jours ... on en parlait avec un collegue et il me disait que finalement pour venir ici, il vaut mieux avoir vecu dans une grande ville que dans un petit village. Pourquoi ? La vie d'un petit village ou tu connais tout le monde et ou tu ne peux faire tes courses sans passer 2h a parler avec tout le monde. La ville ou tu peut etre seul dans ton coin sans parler a personne, meme si tu es entoure de monde. Kuujjuaq c'est un peu cela: tu es seul sans forcement connaitre beaucoup de monde au depart -- ou pour plus longtemps, tout depend de ton caractere -- mais dans une ville de la taille d'un village, sans en avoir la proximite (complicite ? ). Et celui qui vient d'un village aurait plus de mal a s'acclimater au coin.

Pour ce qui est de l'hiver, oui il y a encore de la neige et des periodes de froid. Je me suis fait avoir en allant dans un village a 800 Km plus au nord sans regarder la meteo. Resultat: -20 au thermometre, un vent a decorner les cocu, des la neige a en plus finir ... et devoir travailler sur un toit. J'avais juste un jean sur moi, des chaussures de securite et mon manteau CanadaGoose. Au bout de 20 minutes j'avais le cul gele !! :biggrin: ... Je repars dans 15 jours mais la, je me renseigne sur la meteo avant :-) ... Aujourd'hui il a fait chaud: -2 environ. Assez pour ne pouvoir sortir qu'avec un sweater sur le dos.

Avec ma gamine, enfin mes gamines lorsque la seconde pointe le bout de son nez, il y a Skype. Essentiellement les week-end. Et va faire un devoir de Maths a distance avec les exercices scannes par la gamine !! Folklo :rolleyes: . Je suis coupe physiquement mais pas affectivement. Que ce soit avec femme et enfants en France, ou encore avec ma tante et oncle a Mississauga, ni les amis.

Bien sur rien ne vaut le contact direct .. mais cela est compense par les relations ici, le fait de voir arriver du monde a l'improviste car la porte est rarement fermee a cle. Quelqu'un passe: cela te dit de faire ceci ou cela ... et tu embrayes en laissant en plan ce que tu avais commence ... Ce type de relation je l'avais a Tahiti: lieu de passage ou tu peux voir du monde pendant 1 semaine, 1 mois ... plus. Tu apprecies le temps qu'ils sont la -- ou pas du tout mais tu ne t'embarasses pas de l'inutile et tu ne recherches pas la relations professionnelement porteuse -- , et cela devient naturel ce passage fugitif dans ta vie. Tu restes plus ou moins proche par la suite ... cela te fait "oublier" la distance d'avec la famille.

  • Habitués
Posté(e)

Merci pour ton témoignage et laisse moi te dire que tu forces le respect par rapport à ton parcours et expériences.

Je te souhaite de toujours pouvoir réaliser tes rêves dans la même verve.

Si je puis me permettre, je pense que l'Australie serait une étape très intéressante.

Posté(e)

Ah tiens petite histoire drole (et vécue) à propos de ma mère voulant que je lui ramène un beau bucheron canadien. Justement !

Mes parents sont venus me voir il y a deux ans maintenant. Le lendemain après une petite visite des lieux, et voyant que ça fatiguait un peu dans les rangs, je leur propose :

- "allons prendre un café chez Tim".

- Ma mère aux anges : "ah oui Tim, c'est qui ? Ton nouveau petit copain ??"

Moi me dirigeant vers les lieux tout sourire, je ne dis rien... (ne gachons pas mon plaisir)

- Ma mère insistante un peu (limite gonflante meme quand elle a décidé de me caser avec tous les hommes de 18 à 40 ans qu'elle croise) : "mais c'est quoi son nom de famille à ce Tim"

- Moi : "ah Tim Horton's qu'il s'appelle, typiquement d'ici tu vas aimer ! On ne peut pas faire plus canadien que ça !"

- Ma mère frétillant sur place : "oh un nom qui sonne anglais, chéri va falloir qu'on se mette sérieusement à l'anglais. Pour parler ça va pas être facile, mais j'ai encore quelque reste de mon anglais du collège"...

Vous ne pouvez imaginer la tête de ma mère quand on est arrivé devant le Tim Horton's et que je lui ai dit, "voilà on est arrivé chez Tim" et qu'elle a vu l'enseigne en gros "Tim Horton's" :rofl:

Elle faisait la gueule, la pauvre :D

Mais c'était tellement drole !!! :lol:

très drôle...

j'ai les mêmes problèmes avec la mienne :whistlingb:

A défaut d'un bucheron Canadien, un confrère Français ferai l'affaire ???? :innocent:

  • Habitués
Posté(e)

Merci Tohonu pour le témoignage a Kuujjuaq... De Tahiti a Kuujjuaq, ouf, le changement de température !

Comme tu dis : est-ce qu'il vaut mieux etre connu dans son village ou inconnu dans une grande ville ???

Le fait du petit village dans le Grand Nord, ou tout le monde te connait, n'a peut etre pas que des inconvénients, effectivement, tu vois du monde, alors que c'est vrai qu'a Montreal, tu peux vite te sentir seule finalement...

J'aime bien ton truc : à -2°C il faut chaud :biggrin: et ta description des devoirs de maths via Skype... j'imagine deja... Penche la webcam que je vois ce que tu as écrit (et toi essayant de déchiffrer son exercice avec les pixel de la webcam) :thumbsup:

Heureusement que Skype est la, c'est bien vrai, ça aide pas mal contre l'éloignement. Moi j'avais fait un souper avec un ami en France comme ça. Ca avait été le fun. (enfin lui soupait et moi je lunchais). Comme si on était face a face a table ! C'était cool !

Allez bonne continuation, à toi aussi !!!

Posté(e)

waouh merci laure pour le récit.

Bah on dirait que tu as un talent caché:l'écriture.

je vais te piquer ton idée de petit papier.

encore merci

  • 2 weeks later...
  • Habitués
Posté(e)

Arrivée un 26 avril 2008. Il y a des dates comme cela quon noublie pas, qui sont gravées dans nos mémoires. Des dates si importantes que lorsquil faut se souvenir, on se dit : « ah ! Ça fait plus de 3 ans que ça sest passé parce que jétais encore en France ». Comme un point de repère.

Il faisait beau cette journée là, même très chaud. Pourtant il y avait encore de la neige partout, cétait la fin de ce fameux hiver 2008 qui a battu tous les records. Le weekend a été magnifique à se balader dans Montréal, ma coloc, jouant les guides, ma expliqué en deux jours top chrono comment me débrouiller seule par la suite. 10 jours après, début mai, il neigeait, limmigration mavait mis des réunions dimmigrants durant des jours et javais déjà commencé les cours à HEC. Ça commençait fort je trouvais, je navais pas eu le temps de souffler !

Après trois ans ici, on me demande encore pourquoi je suis venue au Canada. Pourquoi le Québec alors que la France est si jolie, est si agréable. Cest vrai après tout pourquoi je suis venue ? Un roumain, un algérien ou un haïtien par exemple, on lui demande quasiment jamais pourquoi il est venu, ça coule de sens (misère, guerre, pauvreté, dictature, ect) mais une française, cest étrange tout de même. Et partir si jeune et toute seule ! Cest pas normal ! (javais 23 ans quand je suis arrivée avec mes 2 valises et à part ma coloc je ne connaissais personne).

Si au départ, je savais pourquoi je partais (je me le suis écrit quelque part pour ne pas oublier dans mes moments de « blues de limmigrant » comme je les appelle), aujourdhui, ma mémoire ne sait plus très bien pourquoi je suis partie exactement. Pour un meilleur emploi, une vie plus agréable, un raz le bol de la France. Certainement, mais ma vie de jeune française entrant sur le marché du travail nétait pas si mal finalement et jétais bien loin des grandes villes pour me tracasser des problèmes dinsécurité, dembouteillage ou autres. Pour changer dair, partir à laventure, découvrir le monde. Certainement aussi, mais laventure des débuts à vite laisser place au quotidien et à la routine. Alors pourquoi suis-je partie finalement ? Tout cela en valait-il la peine ? Était-il nécessaire de partir à 6000km loin de mon pays, de mes racines, de ma famille, de mes amis, de mes habitudes, pour arriver dans un pays que je ne connaissais finalement pas, sans repère, sans famille, sans amis (enfin si une amie tout de même), à reprendre des études, à se faire une place, à recommencer, à être complètement seule finalement face à son destin.

Pourtant, quand je rentre en France, en visite chez la famille, je me rends vite compte (au bout de 3 jours généralement) que ce pays nest pas le mien. Que jai beau lapprécier, que jai beau le défendre dans ses idées et dans ses valeurs, que jai beau crier haut et fort : « je suis française et alors ? Ça te gène ! ». Pourtant ce pays a un je-ne-sais-quoi qui ma toujours dérangée et qui ma fait dire très jeune quil faudrait que je le quitte un jour pour certainement mieux lapprécier.

Aujourdhui, je suis au Canada, au Québec devrais-je dire pour le meilleur et pour le pire. Jai, comme un mariage, signé quelque part sur un bout de papier (mon visa de résident permanent) que je minstallais ici.

La vie au Canada est comme une vie de couple. Au début, tout est beau, tout est rose, tout est merveilleux. On découvre, on sémouvoit (oui je fais une faute grossière, mais je préfère cette conjugaison, ça me parle plus), on apprend sur lautre, on rit, on est content de notre choix et rien ni personne nous fera changer davis. On est tellement heureux (ou aveugle) que le froid nest quune broutille passagère (qui dure 6 mois quand même !), que la neige vous rappelle un gâteau sur plusieurs couches (ma coloc me la rappelé ya peu mes commentaires du premier hiver, mon dieu comme je devais être euphorique durant la première année), on sattendrit devant les écureuils à porter de main et on dit haut et fort que la ville de Montréal est dune propreté incroyable et tellement sécuritaire ! Laccent québécois vous ravie et les particularités de la langue québécoise vous amuse. Cest généralement la première année darrivée. Lannée bisounours si on peut dire : lunette rose et sourire plein la bouche.

La deuxième année, les défauts commencent à apparaitre les uns après les autres et notre vie davant commence sérieusement à nous manquer. On se demande souvent quest-ce quon fout ici, pourquoi il faut reprendre des études (je ne suis pas devenue plus stupide en traversant un océan que je sache ?), pourquoi on est obligé de prendre des jobs sous-qualifiés, de prendre des claques dans la figure de refus perpétuels doffre demploi, dincompréhension perpétuelle face à ce pays et à ces coutumes. On découvre un système de santé merdique où la règle dor est de ne jamais tomber malade et de ne surtout pas aller aux urgences. On apprend par nos amis immigrants venus dEurope de lEst, quici cest parfois pire que chez eux sur bien des aspects. On regarde avec terreur les infrastructures de Montréal qui tombent en lambeau (létat des routes, le pont Champlain, les bâtiments à se demander comment ça tient encore debout). On saperçoit que les équivalences de diplômes, les séances dimmigration, les recherches de jobs, bref larrivée dimmigrants en elle-même nest quune grosse machine à fric et dexploitation de main duvre pas cher et très qualifiée quon met sous le coup du renouvellement de la population en leur disant haut et fort venez ici cest le paradis. Pourtant, quand on arrive, on est face à un véritable choc culturel et un cauchemar de recherches demploi. On sattendait à tout sauf à sen prendre plein la figure. On traite les écureuils de rats en les faisant déguerpir et lautomne a son charme, cest bien vrai, mais putain quand est-ce quils vont ramasser les feuilles parce que ça fait déjà trois fois que je glisse dessus ! Lhiver est interminable et on se demande encore comment cest possible den apprécier la beauté quand il fait -40°C (sans le facteur vent), comment ses habitants peuvent-ils encore jouer dans la neige alors que moi jai les pieds gelés, le nez congelé et les larmes qui forment des glaçons sur mes joues. On prie fort pour que le réchauffement climatique arrive plus vite que prévu et que les cocotiers apparaissent enfin à Montréal. On est dégouté de tout ce qui nous entoure. On en vient à penser que les québécois sont tous des cons, des incompétents souvent illettrés et individualistes, qui prétendent défendre le français alors quils le souillent et le malmènent. Bref, comme dans une vie de couple, les défauts des débuts qui étaient si charmants deviennent de véritables cauchemars, on insulte le pays qui nous a accueilli et ses habitants, on a envi de vomir par tous les ports ce Ô Canada et en plus cette situation cest nous qui lavons choisie. Bravo, quel choix !!!

Ça cétait ma deuxième année. Pas très belle, je dois lavouer. Les coups de blues ont été nombreux et je me suis souvent dit que jallais rentrer, ça franchement pas été facile. Mais non, je suis assez têtue et javais prévu le coup que cela nallait pas être facile, quil allait falloir saccrocher. Souvenez-vous de mon petit papier « pourquoi je suis partie au Canada », ça ma drôlement aidé dans les moments de doutes.

Et puis, alors que tous ces moments de blues viennent les uns après les autres, que les échecs sont de plus en plus nombreux, il y a quand même à coté des petites victoires. Des amis qui sont là, quon a découvert dans ce pays par hasard (comme toutes les bonnes rencontres) et comme ils disent « si tu nétais pas venue, jamais on se serait rencontré ». On se rend compte que le froid canadien nest quune façade parmi tant dautres et on se rappelle ce dicton : « mains froides, cur chaud » qui est à limage du Canada et de ses habitants : il faut arriver à aller plus loin que la froideur des gens dici pour se rendre compte quà lintérieur, se sont de vrais curs sur pattes. Ya des gens vraiment bien ici, aussi bien les québécois que les immigrants qui arrivent. Des grandes joies lorsquenfin une entreprise québécoise vous offre une chance, quune DRH se penche enfin sur votre CV et que même si elle vous dit : « vous navez pas dexpérience canadienne, votre salaire sera moins élevé », vous vous en foutez complètement parce que vous savez quune fois rentrée dans le cercle « des gens qui ont de lexpérience ici », plus rien ne pourra vous arrêtez.

The sky is the limit. Cest la première chose quon mait dite lorsque je suis arrivée. Cétait dans une séance dimmigration. Cette phrase, je lai toujours gardée dans un coin de ma tête, comme un leitmotiv. Car nous voilà dans la troisième année.

Jai un job, mais pas encore dans ce que javais en partant, mais je sais que ça sen vient. Par contre, jai toujours trouvé dans ma profession (la comptabilité) et ça cest déjà pas mal. Les études que jai commencées au tout début touchent bientôt à leur fin (plus que deux mois). Les amis, les rencontres ont été nombreuses et des vraies, celles sur qui on peut compter. Jai des amis québécois mais aussi de tout horizon. Des collègues de travail charmants qui me taquinent souvent en me traitant de « petite française ». Rien de méchant, bien au contraire : qui aime bien, châtie bien. On en vient à dire que mon accent français nest pas si français que ça finalement et même à me dire que jai des intonations québécoises (bâ lâ !). Les québécois que je rencontre oublient même que je suis immigrante et se mettent à parler leur langue québécoise sans aucun complexe, celui où faut tendre un peu loreille sous peine de rien comprendre pendant 15-20 minutes. Ils parlent de limmigration et des immigrants, de lindépendance du Québec et de ses vraies valeurs et je suis obligée de leur dire « hey oh, je suis là » pour quils se rappellent que je fais partie des 54,000 immigrants qui arrivent chaque année au Québec. Je me suis réconciliée avec une partie de moi-même, le Canada maura appris au moins cela : à apprécier le chemin parcouru, ce que lon a dans la vie. Peut être pour cela que jétais partie après tout, pour apprendre à me connaitre, pour grandir, pour menlever ce blues et ce mécontentement constant qui collent aux français ?

Après trois ans au Québec, on commence à défendre quelques idées, à défendre ses habitants et à lutter contre les clichés qua la famille en France. Fini le temps où on était jeune immigrant fraichement arrivé qui ne dit rien parce quil nose pas car il nest pas tout à fait chez lui encore, un peu comme un invité. Lesprit gueulard français qui est en moi à retrouver son énergie, je veux même importer les grèves, ça fera du bien une petite révolution et ça calmera quelques employeurs trop surs deux. Je paye des impôts ici, je demande ma nationalité dans 4 mois, pourquoi je ne pourrais pas dire ce que jai envi de dire ! Non mais oh !!! Après trois ans ici, lacharnement des québécois à défendre la langue française devient aussi mon combat même si je suis plus réservée sur le coté « anglais = méchant envahisseur ». Jai dailleurs appris la langue anglaise (que je ne maitrise pas encore complètement) pour ne pas faire mon hypocrite face au marché du travail montréalais. On sintéresse à la question de lindépendance du Québec car leurs idées intriguent. Pauline Marois ne dit pas que des bêtises après tout. La politique commence à mintéresser : Harper est un idiot avec un sourire simplet, et Gérald Tremblay un escroc avec lui aussi un sourire simplet. Mais il y a dautres partis. Et les 3 élections en 3 ans ici mont aidé à comprendre qui est qui. On commence à connaitre les célébrités dici et à rire devant le festival Juste pour Rire, on en comprend les subtilités des comiques québécois. Cest un bon signe dintégration je trouve, quand on commence à rire aux mêmes choses que les habitants. Le mode de vie relax et cool des québécois, devient très agréable et même si je regrette mes 5 semaines de congés payés et lEurope à portée de pas (lavion est extrêmement cher ici et tout est loin), je marrange pour partir plus souvent mais moins longtemps (et les congés sans soldes sont faciles à prendre) et je découvre le ROC et les USA. Pays différent, habitudes différentes.

Au bout de trois ans donc, je commence à me faire une place ici. Le chemin na pas été facile et il nest pas fini loin de là. Les claques je ne me les prends plus, je les esquive ou je rebondis dessus. Les larmes de désespoir ont laissé la place à un formidable esprit combatif et à une rage dy arriver. Après trois ans ici, on se dit quon ne va pas lâcher laffaire maintenant, trop de temps dengager pour baisser les bras si vite. Je conseille les nouveaux arrivants pour leur éviter les erreurs que jai commises, mais je ne leur dit pas tout, à eux de se faire leur propre expérience aussi.

Je sais que la 4ème année va bien aller. Je vais bientôt avoir mon titre de comptable agréé. Rien que cela, va mouvrir de nombreuses portes sur le marché du travail avec les perspectives qui vont avec. Jenvisage de quitter ce quartier dimmigrants qui est Cote-des-Neiges, plus pour moi, jaspire à meilleur (Westmount, Outremont, Ville de Mont-Royal ? Trop cher encore, mais the sky is the limit, on noublie pas). Lhiver canadien vous oblige à vous surpasser en termes dobjectif personnel : une maison en Floride fait rêver et partir 6 mois de lannée au chaud est à porter de main, ce qui implique den arracher pas mal au travail (quoique le prix des maisons aux USA est en chute libre).

Comme dans un mariage, la 4ème année arrive avec des projets pleins la tête. Je pense sérieusement à acheter une maison (ou à déménager dans un quartier tranquille pour linstant), une voiture, à développer la petite entreprise aussi (je fais les impôts en période fiscale). Dun point de vue moins matériel à me trouver quelquun ici qui partagera ma vie pour être à 100% bien. Comme dirait ma mère et ses clichés sur le Canada : « cest quand que tu nous ramènes un bucheron canadien » -_-. Donc je lance une annonce pour faire plaisir à ma mère : jeune française cherche jeune bucheron canadien, pour longue soirée dhiver mais aussi pour soirée après lhiver et plus si affinité (voila, ça cest fait, jaurais essayé). Je me rappelle mes souvenirs de jeune immigrant en souriant et les mauvais souvenirs sont vite oubliés, ils nous ont simplement rendu plus fort. Je regarde avec tendresse les nouveaux arrivants avec des espoirs pleins les yeux, avec leur lunette rose et leur sourire plein la bouche mais aussi avec un peu de tristesse en se demandant combien vont restés, combien vont tenir et est-ce quils se sont assez préparés. Je sais par quoi ils vont devoir passer pour la plupart dentre eux, je veux les prévenir, mais je sais que la première année, ils nécoutent rien de nos avertissements, ce sont les nouveaux bisounours.

Pourtant malgré ces projets plein la tête, après trois ans ici, je suis aujourdhui plus ou moins convaincue que le Canada nest pas la dernière terre que je foulerais, que ce nest pas mon Saint Graal et Montréal encore moins. Comme en France, il y a un je-ne-sais-quoi qui me fait dire que non, ce nest pas là encore que je vais poser mes valises. Lavenir me le dira si je change encore ou non de pays (on sait jamais si je trouve mon bucheron canadien), on verra ça pour le prochain bilan, mais revenir en France, ne fait pas parti du programme non plus.

Une chose est sure, si aujourdhui vous me demandez « pourquoi je suis partie », je vous répondrais « et pourquoi pas ? ». Après tout quest-ce qui empêchait une jeune fille de 23 ans de partir à la découverte du monde, de traverser la grande flaque pour juste voir ce qui sy passe de lautre coté ? Je ne laurais pas fait, je laurais certainement regretté. Et cest bien cela le bilan de ces 3 années : je ne regrette absolument rien dans cette décision, les bons comme les mauvais moments, tout est à garder, rien nest à jeter, même les mouchoirs de tristesse du « blues de limmigrant ». Et dans 5-10 ans, si je décide de partir du Canada et que vous me demandez encore « pourquoi tu pars ? » ma réponse restera la même : « et pourquoi pas ? ».

Je sais dans tout ça que si je nétais pas partie, je me serais toujours demandée : « et si jétais partie au Canada, ça aurait changé quoi ? ». Frank Sinatra disait dans sa chanson My way : « regrets, Ive had a few, but then again, too few too mention ». Cest en parti ce qui avait motivé à lépoque ma décision : je peux vivre avec des remords si je me suis trompée, mais en aucun cas, je naurais supporté les regrets de ne pas avoir essayé. Et en plus, je nai aucun remord dans ma décision. À la bonne heure !!!

Si je nétais pas partie par contre, je sais que je ne serais pas en train de faire mon bilan de trois ans de vie au Canada depuis plus de deux heures et je ne crierais pas à plein poumon « hey oh jeune bucheron où es-tu ? ». ^_^

Voilà mes trois ans: « I did it my way » (Frank Sinatra My way)

Merci pour ce témoignage et le partage de votre expérience Laureenfr.

Bon courage pour pour installation et intégration.

Ciao :).

  • 1 month later...
  • 1 month later...
Posté(e)

Super ton récit il ma fait pensée à un morceaux de classique qui commence très doux et fini bien mais en passant par plusieurs stade le tout en touchant à chaque fois une émotion différente !!

Bonne continuation

:give_rose:

  • 3 months later...
Posté(e)

Extraordinaire message, plein de lucidités et vraies vérités.

Je suis expatrié dans un autre pays (plus chaud mais bcp moins acceuillant). Ce que tu décris, surtout le syndrome de la 2ème année, je l'ai connu. Je ne compte pas tenter la 3ème car je suis expat et mon contrat ici prends fin.

Je suis en phase d'introspection et de recherche. Le Canada me tente, le Québec me plait énormément (j'y est déjà été 2 fois et j'ai qq amis).

Ton post m'a ouvert les yeux et je sais maintenant que cela sera loin d'être facile surtout en famille.

Merci.

Rejoindre la conversation

Vous pouvez publier maintenant et vous inscrire plus tard. Si vous avez un compte, connectez-vous maintenant pour publier avec votre compte.

Invité
Répondre à ce sujet…

×   Collé en tant que texte enrichi.   Coller en tant que texte brut à la place

  Seulement 75 émoticônes maximum sont autorisées.

×   Votre lien a été automatiquement intégré.   Afficher plutôt comme un lien

×   Votre contenu précédent a été rétabli.   Vider l’éditeur

×   Vous ne pouvez pas directement coller des images. Envoyez-les depuis votre ordinateur ou insérez-les depuis une URL.

  • En ligne récemment   0 membre est en ligne

    • Aucun utilisateur enregistré regarde cette page.



×
×
  • Créer...
Ouvrir un compte bancaire avant mon départ
© 2024 immigrer.com

Advertisement