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Vendredi noir en Austérie

L’austérité pour les nuls

28 novembre 2014 |Josée Blanchette

Le mois des morts se termine et je n’ai que l’austérité à l’esprit. La mort est peut-être un rien austère aussi. Du moins, elle fait dans les services essentiels non subventionnés. On quitte la scène nu comme un ver, en laissant ses dettes derrière, nos restes mortels n’intéressant plus que les cimetières.

Le trépassé est un citoyen modèle en période d’austérité. Il ne manifeste pas, ne proteste jamais, sa tête d’enterrement est pleinement justifiée, il ne coûte rien, s’adresse au privé et réussit à consommer encore post mortem, préarrangements ou pas, avec sandwichs pas-de-croûtes. Tu ne peux pas te serrer la ceinture plus que lui.

Nous ferons de bons citoyens ; le death boom s’en vient. En attendant, j’étais plutôt rassurée par l’idée d’austérité. Je la confondais avec la simplicité volontaire, me disant qu’il était temps qu’on applique une logique chirurgicale pour laisser des finances saines à nos enfants. Vous connaissez le refrain judéochrétien un rien doloriste : si ça ne fait pas mal, c’est que ça ne guérit pas.

Après avoir lu le magazine Liberté, qui consacre son dernier numéro à l’austérité, je saisis que nous sommes passés de la chirurgie à la chimiothérapie. On nous administre un remède de cheval pour notre bien, quitte à ce que nous en mourions, pour le mieux-être de… de toujours les mêmes.

Le sociologue Éric Pineault se déchaîne sur l’idéologie austérienne dans Liberté : « Il ne faut surtout pas penser qu’il est question d’un mauvais moment à passer, d’une simple traversée du désert, ou qu’on doive tout simplement se serrer la ceinture le temps d’atteindre un fantomatique équilibre budgétaire. Non, l’austérité est un levier de transformation sociale », écrit-il dans « Bienvenue en Austérie ». Selon lui, cette idéologie ne vise « rien de moins qu’une révolution conservatrice permanente ».

J’ai vérifié auprès de mon économiste de mari ; il n’était pas au fait que l’austérité est un courant idéologique. « Porter des bas bleus peut être une idéologie politique aussi ! » Et les théories du complot lui donnent de l’urticaire avancée. N’empêche, Monsieur le mari, tu ne trouves pas qu’on joue avec les allumettes ?

Quand l’austérité tue

Oui, il trouve. Ça fait des mois qu’il me prévient que ça va trop vite, trop loin, qu’on coupe trop partout et que la classe moyenne va descendre dans la rue. C’est demain, la rue, je le rappelle. À la maison, nous parlons d’hostie-rité.

L’économiste Pierre Fortin a même tiré sur l’alarme vendredi dernier à RDI Économie : le Québec risque de basculer en récession d’ici deux ans à cause des politiques d’austérité, aussi appelées plus sobrement « rigueur budgétaire » ou « consolidation ».

Rappelons ici que l’austérité appliquée un peu partout en Europe a été condamnée par le FMI (qui l’avait d’abord préconisée) comme méthode de correction économique. Loin d’atteindre les cibles souhaitées, l’austérité nuit à la relance économique et foutrait tout le monde dans le pétrin.

Moins de jobs, moins d’argent ; moins d’argent, moins de consommation ; moins de consommation, moins de jobs, et rebelote. J’oubliais : moins d’État, plus de privé. On pourrait penser que ça s’arrête là.

Eh bien non. L’austérité tue, mais il n’existe pas de cimetières pour aller pleurer les dommages collatéraux du déficit zéro. Selon les auteurs David Struckler et Sanjay Basu, deux chercheurs en santé publique, l’un à Oxford, en Angleterre, l’autre à Stanford, en Californie, l’austérité augmenterait l’alcoolisme, le nombre d’épidémies, de dépressions, de suicides.

Les deux auteurs de Quand l’austérité tue (paru en 2013 sous le titre The Body Economic. Why austerity kills) se sont penchés sur des études de santé publique étalées sur dix ans, comparant notamment l’Islande (une des plus grandes catastrophes bancaires en 2008 et un système de santé financé par l’État, comme le nôtre) avec la Grèce.

L’Islande n’a pas connu de hausse de mortalité durant ce qu’on appelle la Grande Récession, en partie parce qu’elle a mis en prison les banquiers néo-vikings et maintenu ses programmes d’aide sociale.

La Grèce, elle, avec l’austérité, a vu le taux de VIH augmenter de 200 %, le nombre de suicides doubler, le retour de la malaria… une tragédie grecque.

Les auteurs nous rappellent que plus de 10 000 Islandais sont descendus dans la rue, armés de leurs casseroles, et ont déclenché des émeutes en 2009. 3 % de la population (l’équivalent de 10 millions de personnes aux États-Unis, ou de 250 000 personnes au Québec) a eu raison du gouvernement en place, des coupes et des banquiers.

Paradis fiscaux et Black Friday

Dimanche dernier, j’assistais à un panel au Salon du livre de Montréal. Mon économiste de mari, le journaliste Gérald Fillion, l’économiste Ianik Marcil et le chercheur Alexandre Sheldon (qui a participé au livre primé par le prix Pierre-Vadeboncoeur, Paradis fiscaux, la filière canadienne, d’Alain Deneault) y discutaient d’austérité et de paradis fiscaux.

J’ai pris quelques notes dans mon calepin lorsqu’il a été question de trouver l’argent pour atteindre le déficit zéro. « De 1981 à aujourd’hui, l’impôt des entreprises est passé de 38 % à 15 %. »« On assiste à une augmentation constante des paradis fiscaux, de 1500 % depuis 20 ans. C’est désormais la norme. »« Au Canada, cela représente 50 % des transactions, soit 170 milliards de dollars en 2013. »

Vu l’opacité desdites transactions et la dématérialisation technologique, on peut soupçonner que ce montant s’avère très « conservateur ». Mais, selon des calculs denapkin sur un coin de la table, en taxant les paradis fiscaux au Québec, on comblerait le déficit annuel.

Les panélistes ont tous convenu en soupirant qu’il faudrait une volonté politique pour les éliminer. Rappelons que M. Couillard a placé des fonds dans l’île de Jersey lorsqu’il travaillait en Arabie Saoudite.

Question : quel est le seul parti, aux dernières élections, qui parlait de paradis fiscaux et dénonçait l’austérité pour valoriser la solidarité ? Il a réussi à faire élire trois députés seulement. C’est David contre Goliath.

Sur ce, je vous laisse aller profiter de ce vendredi noir dans les magasins. Ne ratez pas les soldes sur les casseroles.

http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/425168/vendredi-noir-en-austerie

Modifié par kobico
Posté(e)

Vive le vendredi fou ( :blink2: ), les casseroles sont en solde et sont trois fois moins chères. Achetez-en en masse, pas pour envahir les rues après, mais plutôt pour pouvoir y préparer les fruits de l'austérité. L'austérité ramène l'équilibre, refait ses comptes et assure l'avenir. Faut pas avoir peur de le côtoyer. Les Libéraux ont compris l'enjeu, normal Jean Chrétien est de la même famille.

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Éric Desrosiers
13 avril 2013 Économie / Actualités économiques
Le Devoir rencontre Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie - L’austérité, quelle idée toxique!


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Photo : Annik MH De Carufel - Le Devoir

L’un des impacts de l’accroissement des inégalités de revenu a été la perte d’influence de la population sur ses dirigeants politiques et leur médecine économique de droite, dénonce le prix Nobel d’économie, Joseph Stiglitz.

Le monde est aujourd’hui aux prises « avec une terrible maladie » qui ravage notamment l’Europe et les États-Unis : l’austérité, a déclaré vendredi le célèbre économiste en entrevue au Devoir. « Nous savons pourtant, depuis la Grande Dépression, que l’austérité ne fonctionne pas. Le Fonds monétaire international [FMI] en a refait la démonstration plus récemment [lors des dernières crises monétaires] en Amérique latine et en Asie, et c’est à nouveau le cas actuellement en Europe. Ce qui est stupéfiant, c’est qu’autant de dirigeants politiques continuent malgré tout d’appuyer ces politiques discréditées, même si des voix aussi conservatrices que le FMI leur disent aujourd’hui que leur austérité est dangereuse et qu’il faut s’occuper de toute urgence de stimuler l’économie. C’est comme si les gouvernements avaient cessé d’écouter. »


Le professeur d’économie de l’Université Columbia, à New York, devait s’adresser quelques minutes plus tard aux militants du NPD réunis en congrès ce week-end à Montréal. Ancien chef des conseillers économiques du président américain Bill Clinton, ex-économiste en chef de la Banque mondiale et corécipiendaire, en 2001, du « prix Nobel d’économie », il est devenu, petit à petit, l’un des grands pourfendeurs de l’idéologie économique de droite. Loin de jouer les vedettes, il se prête simplement et avec le sourire à la pluie de questions du journaliste qui cherche à tirer le maximum des quelques minutes qui lui ont été allouées.

Avertissement : idées toxiques


Cet entêtement à maintenir coûte que coûte le cap sur des politiques d’austérité est quand même étonnant de la part de gouvernements élus quand on sait le mécontentement que sèment ces politiques dans la population. Joseph Stiglitz l’attribue à l’un des nombreux effets pervers de l’autre grand problème qui occupe le plus son attention ces jours-ci. « L’accroissement des inégalités de revenus va de pair avec un accroissement des inégalités politiques. Notre démocratie s’en retrouve déformée. »


Cela s’observe, entre autres, selon lui, par la traduction parfois bien imparfaite du vote aux élections en nombre de représentants élus, par l’influence démesurée des pouvoirs de l’argent sur les médias, ainsi que par la redoutable efficacité de la droite « à vendre ses idées ». « Si on peut vendre des produits toxiques, comme la cigarette, qui tuent des gens, on peut aussi vendre des idées toxiques, comme l’austérité. »


Les idéologues de droite ont développé toutes sortes de trucs pour cela, comme le recours à des analogies accrocheuses, mais tendancieuses. « On va dire, par exemple : les familles savent qu’elles doivent vivre selon leurs moyens. Pourquoi les gouvernements ne le pourraient-ils pas ? Ça semble raisonnable, sauf que le temps dont on dispose et l’ampleur des conséquences en cause ne sont vraiment pas les mêmes. »

Le prix de l’inégalité


Les conséquences de cette médecine de cheval devraient pourtant nous crever les yeux, dit-il. L’Italie ne s’est jamais portée aussi mal depuis les années 30. Les économies grecque et espagnole sont objectivement en dépression. Les millions de chômeurs européens sont un spectaculaire gaspillage de capital humain dont le continent ne se remettra pas avant 10 ans. Les politiques d’austérité se font plus discrètes aux États-Unis, quoique bien réelles. Le secteur public accuse un déficit de 2,5 millions d’emplois depuis la crise alors que la création d’emplois dans le secteur privé est toujours anémique.


Tout cela ne fait qu’aggraver le problème des inégalités, déplore l’Américain. « On ne parle pas seulement des inégalités de revenus, mais aussi de l’inégalité des chances d’améliorer son sort par son travail et son talent : le grand mythe au coeur du rêve américain », dit cet auteur de nombreux ouvrages, dont le plus récent est justement intitulé : Le prix de l’inégalité. La richesse médiane des familles américaines a reculé de 40 % depuis la crise et est revenu à ce qu’elle était il y a deux décennies.


« L’économie n’a pas fait son travail pour la plupart des Américains. Cela montre que les politiques comme la déréglementation, le recul de la fiscalité progressive et le rétrécissement du filet social ont un prix. »


Si certains gouvernements restent dans le déni, d’autres commencent à essayer de corriger la situation. Joseph Stiglitz cite en exemple les pays d’Europe du Nord, mais aussi le Brésil, qui a réussi en 20 ans à réduire des niveaux d’inégalités très élevés à coups de développement économique et de politique sociaux. « La bonne nouvelle, c’est que ça fonctionne. Cela montre qu’il n’est pas seulement question de forces économiques, mais aussi de la façon dont nous décidons d’influencer ces forces économiques. »

Les leçons oubliées de la crise


La faillite de Lehman Brothers et la Grande Récession ont provoqué un déchaînement de promesses de changements dans le fonctionnement du secteur financier, comme de l’économie en général. « Les progrès ont été décevants », estime Joseph Stiglitz. Certaines règles ont été resserrées, mais le monde bancaire en est ressorti encore plus concentré qu’il ne l’était. La récente découverte de la manipulation du Libor - un indice au coeur de l’immense marché des produits dérivés - et la restructuration chaotique de la dette grecque ont montré comment le fonctionnement de la finance échappe encore à presque tout le monde.


L’économiste américain a été content d’entendre le président Obama faire référence, dans son dernier discours sur l’État de l’Union, au relèvement du salaire minimum, aux programmes d’éducation préscolaire et au problème de l’endettement étudiant. « C’est un scandale, 1000 milliards. On a des jeunes qui sortent des universités plus endettés que jamais et dont la formation ne leur permet pas de se trouver un emploi. Ils se retrouvent avec une dette, mais sans actif. Quand une bulle immobilière éclate, on se retrouve aussi avec une dette, mais il nous reste au moins une partie de l’actif. »


La situation en Europe le désespère. Si la crise de l’euro a forcé les gouvernements européens à reconnaître certaines lacunes de leur ambitieux projet, il leur manque toujours une union bancaire, une union budgétaire, une stratégie de croissance commune ou encore une politique industrielle commune.

Facteur d’espoir


En 2008, le président français, Nicolas Sarkozy, a eu l’idée de créer une commission d’experts « sur la mesure des performances économiques et du progrès social », à la tête de laquelle il a placé Joseph Stiglitz. Son rapport concluait que le produit intérieur brut (PIB) était un indicateur bien imparfait du progrès des peuples.


« Le rapport a eu un énorme succès populaire, se réjouit-il. La résonance de notre message montre que les gens ne veulent pas d’une poursuite aveugle de la croissance du PIB, mais une amélioration de leur qualité de vie, un partage de la richesse et un modèle de développement qui est durable. Je crois que c’est un facteur d’espoir. »

  • Habitués
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C est là que l on voit que les populations ne sont que des cobayes des politiques qui se justifient par des thèses de 'grands économistes' qui de toute façon changent du tout au tout de théorie qques années après.

  • Habitués
Posté(e) (modifié)

A moins que je n'aie zappé cela auparavant, c'est bien la première année que j'entends parler de ce fameux "black Friday" en France !

A croire que la criiiiiiiise donne des idées d'importation de traditions aux commerçants locaux !

En tout cas, on ne parle que de ça !

Pourquoi pas après tout ? Si cela permet d'acheter des choses au rabais maintenant alors qu'on les paiera plus cher dans 3 semaines......

Et puis, c'est plus facile d'ouvrir son portemonnaie juste après avoir reçu sa paie de novembre non ? :whistlingb:

Et puis si on n'a plus de sous le 15 décembre, et ben on verra bien !

Trop forts ces commerçants !

Modifié par angela57
  • Habitués
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Vous avez une seule paie par mois?

  • Habitués
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Nous sommes en France, et ici les salaires sont payés une fois par mois en général.

Moi je paie mes salariés le 25.

Bien sûr on peut demander des acomptes avant.

En décembre, c'est vrai qu'il y a le 13ème mois qu'on paie vers le 15 pour que les gens préparent les fêtes.....

Mais ce n'est pas comme ça partout. Le 13ème mois n'est pas une obligation, et payer avant les fêtes non plus.

Alors je crois que cette mode du "black Friday" n'est pas étrangère à ces constatations bassement matérielles !

  • Habitués
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Le black friday a été importé en France par Apple en 2007.Les autres ont suivi concurrence oblige et maintenant c'est populaire.Je trouve ça quand même mieux de faire les soldes avant Noël plutôt qu'après.

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Le sujet est plutôt l'austérité économique que le magasinage du "vendredi fou".

Ce serait bien apprécié de ne pas faire dévier le sujet. :smile:

  • Habitués
Posté(e)

Le sujet est plutôt l'austérité économique que le magasinage du "vendredi fou".

Ce serait bien apprécié de ne pas faire dévier le sujet. :smile:

:biggrin2: c'est du détournement de sujet !

Posté(e) (modifié)

Le black friday a été importé en France par Apple en 2007.Les autres ont suivi concurrence oblige et maintenant c'est populaire.Je trouve ça quand même mieux de faire les soldes avant Noël plutôt qu'après.

La même chose au Québec, ca a été importé. Les Américains inventent et au Québec on se baguare pour la traduction. Ah non il faut dire le vendredi noir, mais non c'est le vendredi fou. Laissez black Friday, et ca revient au même. Ah non le complexe de la langue! :biggrin2:

Modifié par Saam
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