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Ces algériens qui se marient par internet


kabyle

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Si la musique a la réputation dadoucir les murs, la technologie, en Algérie, les transforme à coups de clic de souris. Car même si aucune statistique des mariages, conclus par lentremise du Net, nest possible, il savère que le nombre de nos compatriotes qui ont trouvé lâme sur grâce au clavier de leur ordinateur semble en progression.

Même si les bonnes vieilles méthodes, une première rencontre suivie dune demande, restent indétrônables, le nombre de personnes interrogées qui disent avoir un parent, un voisin, un ami, un collègue qui sest marié grâce à Internet est édifiant sur une mutation sociale qui sinstalle. La parité des sexes, dans ce cas, est parfaitement respectée. Internet nétant que timidement présent dans les foyers algériens, ce sont les cybercafés qui offrent lespace indispensable aux rencontres dabord virtuelles mais qui peuvent aboutir à une union sacrée.

Au commencement, la magie du chat

Lécrasante majorité de ceux qui viennent au cyber le font pour chatter. Des hommes mariés ou pas, des femmes jeunes et moins jeunes, des étudiants, des étudiantes tous se connectent pour dialoguer des heures entières, témoigne le gérant dun cybercafé de la rue Hassiba-Benbouali dAlger qui ne semble pas manquer dhumour : Il ny a que les femmes âgées de 80 ans que je nai pas encore vues chatter. À raison de 50 DA de lheure, les Algériennes et les Algériens traversent les frontières sans le visa qui leur est difficile, pour ne pas dire pratiquement impossible à obtenir, établissent des contacts à travers le monde qui parfois se terminent la bague au doigt. Pourtant, par pudeur peut-être, ceux-là mêmes qui reconnaissent sêtre mariés grâce à une connexion disent que le mariage nétait pas leur premier objectif. Mais devant limmense liberté quoffre lanonymat, face à la possibilité de se créer une identité sur mesure, qui permet de passer de femme à homme et vice-versa, dun habitant dun vague village à un milliardaire, le pas est facilement franchi. Comme le reconnaît Amel, une accro du Net rencontrée dans un cyber de Chéraga : Par le biais du chat on sympathise, on discute de tout et de rien. Avec le temps et lhabitude les liens sinstallent. Sur le chat on retrouve les mêmes personnes dans les mêmes salons. Des affinités se tissent à limage des discussions conventionnelles où il peut y avoir de lhumour et de lesprit Et le mariage dans ces entretiens en est-il question? Pas nécessairement, répond cette femme, divorcée qui souhaiterait refaire sa vie : Sur Internet, il ny a pas de censure, les frontières nexistent pas, nous ne sommes jamais gênés par une présence inopportune. Ainsi donc, les internautes agissent, consciemment ou non, comme sils remplaçaient les lieux de rencontres traditionnels par les liens de la toile. La crainte, pour les femmes notamment, dêtre reconnues par des proches dans un endroit public, en moins. Les pesanteurs sociales alors disparaissent dans lintimité dun cybercafé et dans la complicité dun logiciel informatique. Merci M. Bill Gates. Et cest dans ce même espace Internet de Chéraga que la gérante sest rendue à linsu de son plein gré témoin dun mariage : Javais pris lhabitude de voir une jeune femme venir tous les après-midi. Cela a duré des mois. Jusquau jour où je la vue arriver avec une boîte de gâteaux. Cest mon cadeau pour vous, mavait-elle dit. Je viens de me marier avec un homme grâce à votre cyber !

Naïm et Vanessa Soltani : limmigration prise à contre-pied

Cependant, une question simpose delle-même : les Algériens, qui ont recours aux ordinateurs devenus entremetteurs, visent-ils nécessairement limmigration ? Rien nest moins sûr. Un bel exemple est donné par Naïm et Vanessa Soltani. Lui, Naïm, était animateur à la chaîne El Bahdja. Elle, Vanessa, journaliste en France. Leur histoire pourrait très bien commencer par le traditionnel il était une fois et se poursuivre par la formule consacrée : Ils se marièrent et eurent beaucoup denfants. Aujourdhui, ils sont mariés et viennent davoir des jumeaux. Il était donc une fois un jeune homme, Naïm Soltani, 27 ans, qui refuse lanonymat et accepte volontiers de se confier. Cest en cherchant à télécharger des morceaux de musique quun prénom a attiré son attention sur un site de dialogue : Si je te dis que tu as un joli prénom, tu mignoreras car jai été gentil avec toi. Telle a été la première phrase échangée, raconte-t-il. Cette réplique en appellera dautres : Nous avons alors chatté toute la soirée et nous nous sommes donné rendez-vous sur le Net le lendemain. Moi jétais à Alger et elle en France. Cette rencontre, encore virtuelle, remonte à 2003 alors que les futurs époux ne pensaient pas au mariage. Mais que peuvent bien se dire un jeune Algérien dont le pays panse encore ses plaies et une Française qui ne connaît de lAlgérie quune image souvent déformée par le prisme des médias de son pays. Elle avait une mauvaise image de lAlgérie. À cette époque, elle pensait que tous les Algériens étaient des terroristes. Jai essayé de lui faire changer davis. La tâche na pas dû être de tout repos. De deux heures, puis de quatre, les tourtereaux sont enfin passés à des nuits entières à pianoter sur le clavier. Si bien que quelques semaines plus tard, les messages instantanés ne suffisaient plus à exprimer un attachement en devenir, car rien ne saurait remplacer la voix humaine. Le Net, cétait bien mais ne suffisait plus. Nous nous sommes échangés nos numéros de téléphone. Après quelques conversations, je me suis dit : cest la femme de ma vie, explique Naïm, rencontré dans son bureau dAlger, qui avoue que même quand elle est avec moi, elle me manque. Une belle déclaration damour qui ne peut saccommoder du seul lien téléphonique. Il fallait mettre un visage sur une flamme. Sensuivront, naturellement, des échanges de photos. Je lui en avais envoyé un milliard. Puis la connaissance faite, toujours au bout du fil, avec les parents de Vanessa. Cette dernière a pris, en décembre 2003, un visa dun mois pour pouvoir venir en Algérie. Elle nest jamais repartie. Elle a tout laissé tomber : travail, appartement... pour venir ici. Et nous avons alors décidé de nous marier. Mais comme attendu, lentourage de la jeune Française était unanime quant au risque quelle prenait en sinstallant dans un pays à risques. Vanessa ne pourra pas exprimer, dans ces colonnes, les motivations qui ont présidé à son choix de vivre en Algérie. En janvier, elle soccupait à faire visiter Alger à ses parents venus lui rendre visite. Et cest dans Chronique dune Française en Algérie quelle tient dans le magazine féminin Dzeriet, quelle gère depuis deux années avec son mari, que lon peut se faire une idée de son mariage et ce quelle en pense. En réponse à une de ses compatriotes qui sétonne de la bizarrerie de cette option, la journaliste répond : Comme si vivre à Alger la blanche était une erreur de parcours, comme si lon my avait forcée () Oui Madame, la sécurité en Algérie va bien, merci beaucoup () et pour tout vous dire je me sens plus en sécurité ici dans mon pays de cur que, là-bas, dans mon pays natal ! Une réplique sans appel qui, à lévidence, nest pas du goût dautres jeunes Algériens.

Le concret contre le virtuel

Depuis, Naïm et Vanessa ont créé une autre revue spécialisée dans la téléphonie mobile. Les parents de la jeune Française viennent régulièrement à Alger. Et, à en croire Naïm, ils auraient même décidé de sinstaller en Algérie une fois quils seront à la retraite. Cependant, cet épisode authentique ne saurait en cacher dautres plus près de la réalité de la vie de tous les jours. Ceux qui cherchent une femme, surtout, pour partir. Car Internet est un moyen beaucoup plus sûr que les embarcations de fortune à bord desquelles sembarquent des centaines de jeunes gens pour une aventure à la fin souvent dramatique. La splendeur des paysages de son village natal de Kabylie na pu faire oublier à Aziz le chômage dans lequel il se débat depuis quelques années. Aziz a longtemps accompagné le mouvement de contestation qui a touché toute une région du pays. Aziz, 25 ans, surfait sur le Net tous les soirs à la recherche dune solution à sa situation. Et cest son frère qui en témoigne. Je ne pense pas quil cherchait, du moins au début, une femme à épouser. Mais cest ce qui sest passé. Aziz a passé un nombre incalculable de soirées au cybercafé du village. Jusquau jour, affichant un large sourire, il est venu nous annoncer coup sur coup, son départ en France et son mariage avec une Française. Il sen est sorti ! Et Tant mieux pour lui ! Mais ce que ne dit pas le frère dAziz, cest que la mariée a vingt ans de plus que son mari. À ce sujet, une blague a fait le tour du pays, celle dun jeune Algérien accompagné dune Française dun certain âge. Lorsque celle-ci a trébuché, un passant lui a susurré à loreille : Ramasse tes papiers ya kho !

On pourrait multiplier à lenvi des exemples pareils tant les témoignages sont nombreux. Venir à bout de deux difficultés : partir en Europe tout en résolvant le problème des papiers. Le rêve assuré ! Hafid, lui, nest pas Algérien. Installé en Algérie jusquen 2002, il est ressortissant de notre voisin de lest et avait maille à partir avec les autorités politiques de son pays. À lheure quil est, il doit être dans les bras de sa belle à écouter Jacques Brel chanter son plat pays. À force de chatter, une Bruxelloise, un jour, sest montrée attirée par le bagout du jeune Tunisien et intéressée par ses positions politiques.

Selon son propre témoignage, elle venue lattendre à laéroport de la capitale belge avec cet écriteau, en arabe Marhebene bi Hafid et bonjour la Belgique !

Karim et Ghislaine, lautre départ

Un autre témoignage, celui dun mariage conclu entre un Algérien et une Française, repris intégralement comme nous lont transmis, par courrier depuis la capitale française, Karim, 37 ans, et Ghislaine, 30 ans, installés en France depuis leur mariage. Jétais en pleine déception amoureuse. Un jour, un collègue me conseilla de recourir à un site de rencontre et discussion. Cest lui, qui choisit mon pseudo et me remplit ma fiche. Comme il y a plusieurs salons, selon les nationalités, je cliquais sur celui de la France. Le premier jour cétait calme mais distrayant. Le troisième jour, une fille de Paris me contacta, je ne sais pas ce qui sest passé mais je me sentais proche et à laise, je lui ai raconté ma déception, et comme par hasard, elle aussi venait de rompre avec son ami, après dix ans de vie commune. On avait le même âge. On a échangé nos mails, numéros de téléphone et photos. Tout est allé si vite. Elle est venue me voir à Alger deux fois. Jai pu avoir un visa et lui rendre visite trois fois. Sans trop réfléchir, jai tout balancé à Alger et je lai rejointe à Paris. On sest mariés et notre amour dure depuis cinq ans. Ce que je peux dire, Internet peut être un bon moyen de rencontre, il suffit de tomber sur la bonne personne.

Attention aux mauvaises blagues, mesdames !

Ces histoires damour qui finissent bien ne doivent pas cacher lautre revers de la médaille. La liberté et lanonymat quoffre Internet sont souvent synonymes dimpostures. Il est facile, tapis derrière les touches dun clavier, de déverser sa libido ou de laisser libre cours à ses refoulements sexuels. Le clavier, comme lalcool pour ceux qui en ont besoin, ça désinhibe énormément. Sans aller jusquà cet extrême, des soupirants éconduits peuvent jouer de mauvais tours à celle qui a rejeté leurs avances. Ici, lexemple est donné par un site algéro-allemand (voir lentretien) spécialisé dans les rencontres. Ce site affiche les numéros de téléphone des candidates au mariage ! Chose plutôt rare. Plusieurs de ces femmes, originaires de différentes régions dAlgérie, une fois contactées (par nos soins) disent navoir jamais passé dannonce de mariage dans quelque support que ce soit. Amira, cest le prénom donné par ce site, répond au téléphone : Vous nêtes pas le premier à mappeler. Je nai jamais fais dannonce. Cest mon ex-fiancé qui, pour se venger, a donné mon numéro. Amira nest pas un cas isolé. Sur un autre site, le numéro de Katia est disponible pour qui le veut. Egalement appelée, la jeune femme sétonne : Jai commencé par recevoir plusieurs appels. Cela ma évidemment intriguée. Jai alors demandé à une personne que jai eu au bout du fil comment a-t-elle eu mon numéro. Sa réponse ma sidéré : mais demoiselle je réponds à une annonce de mariage que vous avez passée ! Comme les happy end, ces blagues dun goût douteux font légion. Que prévoit la législation algérienne dans ce cas ?

Un vide juridique à combler

Le 22 janvier sest tenu à Alger une rencontre internationale qui a débattu de la cybercriminalité. Car il y a bien délit lorsque des données personnelles sont disponibles sans consentement préalable de la personne concernée. Cette rencontre, à laquelle avait pris part un directeur central du ministère des Télécommunications, avait mis à nu un vide juridique. Une commission de lutte contre la cybercriminalité est en phase de préparation de textes juridiques. Elle a été installée en mars 2006 et sattelle à préparer une batterie de lois pour la protection et les libertés et des droits des citoyens () Elle prépare la mise en place dinstruments en rapports avec les conventions internationales, avait alors promis ce responsable. En attendant que la batterie soit fonctionnelle, faites attention, mesdames. Amel, laccro du Net, prévient de son côté les candidates au mariage par Internet : Ne jamais donner son numéro de téléphone ni son adresse. Et surtout ne pas envoyer de photo à celui qui, au premier contact en ferait la demande ! Laissez plutôt faire le temps. À bonne internaute Salut !

S. B.

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