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Comment peut-on être français ?


maxtaz

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Cet article vient de m'interpeler...

Nous n'avons pas eu de soucis pour les papiers et l'obtention du visa (juste pour le remboursement).

Mais notre fils est né ici et s'il vient à demander la nationalité française, ça peut se compliquer...

Un bon témoignage vaut souvent mieux qu'un long article. Il arrive parfois qu'ils se marient et donnent naissance à une enquête, laquelle suscite à son tour une portée de témoignages nouveaux. Le journal joue alors pleinement son rôle de révélateur. C'est exactement ce qui s'est passé avec l'un des sujets les plus sensibles de la campagne présidentielle.

Le 11 mars, Kristian Feigelson, sociologue, nous propose, "en écho aux propos de Nicolas Sarkozy sur un ministère de l'immigration et de l'identité nationale", un texte destiné aux pages Débats. Il y narre sa propre déconvenue lorsque, à la faveur d'un renouvellement de passeport, il a dû prouver une nationalité française qu'il pensait jusque-là évidente - puisqu'il est né en France de parents naturalisés français après avoir échappé de justesse à la Shoah.

Ce témoignage souligne les échos douloureux que réveille, dans certaines familles, le renforcement des procédures de contrôle. Il révèle la gêne, voire l'humiliation de ceux qui, se croyant à l'abri, ont brusquement le sentiment d'"appartenir à une sous-catégorie de citoyens". Le cas de M. Feigelson est-il isolé ? Ses sentiments exceptionnels ? Il mérite enquête.

Anne Chemin, rédactrice spécialisée dans les problèmes de société, rencontre M. Feigelson et divers responsables dans les milieux associatifs et l'administration. Elle découvre que, loin d'être l'exception, son cas touche au moins 10 % à 12 % de la population (née en France de parents étrangers ou à l'étranger de parents français).

Depuis l'instauration, en 1987, de la carte d'identité sécurisée et surtout, en 2006, du passeport électronique, la présentation du document périmé ne suffit plus ; pour obtenir un nouveau titre, il faut prouver à nouveau sa nationalité. D'où une série de complications administratives jugées tantôt vexatoires, tantôt normales, mais qui prennent toujours par surprise des Français considérés comme tels depuis belle lurette.

L'enquête, publiée en Page trois dans Le Monde daté du samedi 31 mars, sous le titre "Les papiers de vos parents, s'il vous plaît !", a suscité une avalanche de courriers pour une fois laudateurs et surtout une série de témoignages passionnants. S'y profile une étonnante galerie de portraits de ces Français pur jus, renvoyés par les hasards de la bureaucratie, de leur histoire familiale et de la campagne électorale dans le camp des citoyens "pas tout à fait comme les autres".

Outre les Alsaciens, victimes depuis longtemps des vicissitudes de l'histoire, il y a les rapatriés d'Algérie, qui, souligne Lucien Chich (Francheville), "bien que nés en territoire français, de même que leurs parents et grands-parents, tous de nationalité française, sont invités à apporter la preuve de leur nationalité". Une "suspicion stigmatisante", estime-t-il, rappelant que "c'est sous le régime de Pétain que, dans notre pays, alors coupé de l'Algérie, des membres de ma famille ont déjà dû faire établir, par le juge de paix, des documents attestant leur nationalité française".

Il y a aussi toutes ces familles bousculées par la décolonisation. Telle celle d'Albert Penso, dont l'histoire est presque caricaturale : né à Saint-Germain-en-Laye en 1923, "déporté résistant", titulaire d'une croix de guerre et officier de la Légion d'honneur, il a pourtant eu toutes les peines du monde à obtenir un certificat de nationalité française. Sur les seuls documents en sa possession, son père, né à Damas sous l'Empire ottoman, était qualifié d'"israélite du Levant" et "protégé français", et sa mère "née à Oran" - d'un père alsacien exilé en Algérie après la Commune de Paris. "Les papiers disparus, (...) rien de cela ne permettait à un fonctionnaire compréhensif et appliquant la loi de certifier que j'étais bien français. Cependant, plein de bonne volonté, il trouva le texte salvateur." M. Penso fut donc déclaré français "comme étant né de parents dont la nationalité est inconnue" (sic). "A défaut, ajoute-t-il, je me demande fichtrement bien ce que j'aurais pu être."

Chacun y va de ses mésaventures ubuesques avec l'administration. Tel Roger Kuban, qui, à l'instar de ces nombreux descendants de familles chassées d'Europe de l'Est par les pogroms, s'est vu, pour la première fois, à 60 ans, refuser un passeport - alors qu'il était titulaire depuis toujours d'une carte d'identité mentionnant sa "nationalité française" et d'une carte d'électeur. Ou Catherine Meurant-Jaworski, qui a dû prendre conseil auprès d'un avocat pour se sortir d'un guêpier administratif inextricable, les actes de naturalisation de ses parents, nés en Pologne, étant mis en doute...

"J'ai même dû prouver que je n'avais pas renié ma nationalité six mois avant ma majorité !", souligne pour sa part Nicole Dispans Guitton (courriel), née à l'étranger de parents français, à qui, à sa "grande stupéfaction", on a demandé de prouver sa nationalité "alors que, depuis 47 ans, j'ai toujours été française". Encore plus absurdes, si possible, les tribulations racontées ci-dessous par Dominique Lecomte (Kinshasa) ou Jean-Pierre et Paulette Queyroy (Marseille).

Il y a mille manières d'être français. Et ces lettres les racontent, à leur manière, humoristique ou véhémente. Toutes remercient Le Monde d'avoir mis en lumière une histoire si proche de la leur.

A deux exceptions près, qui soupçonnent l'auteur d'intentions politiques masquées. "Rien de nouveau sous le soleil", remarque Pierre Laconche (Ecully), signalant les difficultés d'un de ses collègues, il y a vingt ans, pour renouveler sa carte d'identité. De même, Renaud Delourme s'étonne : "Qu'y a-t-il de douloureux" dans le rappel de l'histoire familiale de Kristian Feigelson ? " Ce papier n'est-il pas dirigé contre le candidat de l'"ordre", le ministre de l'intérieur, sûrement responsable d'une telle situation ?"

C'est chercher une mauvaise querelle à un bon article qui ne prétendait pas créer l'actualité, mais traiter sur le fond un thème de campagne. "Je ne voulais pas dire que l'application de ces nouvelles règles, justifiée par la lutte contre la fraude, était illégale, abusive ou exorbitante, explique Anne Chemin. Je voulais raconter qu'en demandant de justifier leur nationalité à certaines personnes on réveille chez elles un passé douloureux, et que beaucoup le vivent mal." Le nombre de témoignages reçus montre que ces sentiments sont largement partagés, et justifie l'enquête.

Véronique Maurus

source : le Monde

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Nous n'avons pas eu de soucis pour les papiers et l'obtention du visa (juste pour le remboursement).

Mais notre fils est né ici et s'il vient à demander la nationalité française, ça peut se compliquer...

Un bon témoignage vaut souvent mieux qu'un long article. Il arrive parfois qu'ils se marient et donnent naissance à une enquête, laquelle suscite à son tour une portée de témoignages nouveaux. Le journal joue alors pleinement son rôle de révélateur. C'est exactement ce qui s'est passé avec l'un des sujets les plus sensibles de la campagne présidentielle.

Le 11 mars, Kristian Feigelson, sociologue, nous propose, "en écho aux propos de Nicolas Sarkozy sur un ministère de l'immigration et de l'identité nationale", un texte destiné aux pages Débats. Il y narre sa propre déconvenue lorsque, à la faveur d'un renouvellement de passeport, il a dû prouver une nationalité française qu'il pensait jusque-là évidente - puisqu'il est né en France de parents naturalisés français après avoir échappé de justesse à la Shoah.

Ce témoignage souligne les échos douloureux que réveille, dans certaines familles, le renforcement des procédures de contrôle. Il révèle la gêne, voire l'humiliation de ceux qui, se croyant à l'abri, ont brusquement le sentiment d'"appartenir à une sous-catégorie de citoyens". Le cas de M. Feigelson est-il isolé ? Ses sentiments exceptionnels ? Il mérite enquête.

Anne Chemin, rédactrice spécialisée dans les problèmes de société, rencontre M. Feigelson et divers responsables dans les milieux associatifs et l'administration. Elle découvre que, loin d'être l'exception, son cas touche au moins 10 % à 12 % de la population (née en France de parents étrangers ou à l'étranger de parents français).

Depuis l'instauration, en 1987, de la carte d'identité sécurisée et surtout, en 2006, du passeport électronique, la présentation du document périmé ne suffit plus ; pour obtenir un nouveau titre, il faut prouver à nouveau sa nationalité. D'où une série de complications administratives jugées tantôt vexatoires, tantôt normales, mais qui prennent toujours par surprise des Français considérés comme tels depuis belle lurette.

L'enquête, publiée en Page trois dans Le Monde daté du samedi 31 mars, sous le titre "Les papiers de vos parents, s'il vous plaît !", a suscité une avalanche de courriers pour une fois laudateurs et surtout une série de témoignages passionnants. S'y profile une étonnante galerie de portraits de ces Français pur jus, renvoyés par les hasards de la bureaucratie, de leur histoire familiale et de la campagne électorale dans le camp des citoyens "pas tout à fait comme les autres".

Outre les Alsaciens, victimes depuis longtemps des vicissitudes de l'histoire, il y a les rapatriés d'Algérie, qui, souligne Lucien Chich (Francheville), "bien que nés en territoire français, de même que leurs parents et grands-parents, tous de nationalité française, sont invités à apporter la preuve de leur nationalité". Une "suspicion stigmatisante", estime-t-il, rappelant que "c'est sous le régime de Pétain que, dans notre pays, alors coupé de l'Algérie, des membres de ma famille ont déjà dû faire établir, par le juge de paix, des documents attestant leur nationalité française".

Il y a aussi toutes ces familles bousculées par la décolonisation. Telle celle d'Albert Penso, dont l'histoire est presque caricaturale : né à Saint-Germain-en-Laye en 1923, "déporté résistant", titulaire d'une croix de guerre et officier de la Légion d'honneur, il a pourtant eu toutes les peines du monde à obtenir un certificat de nationalité française. Sur les seuls documents en sa possession, son père, né à Damas sous l'Empire ottoman, était qualifié d'"israélite du Levant" et "protégé français", et sa mère "née à Oran" - d'un père alsacien exilé en Algérie après la Commune de Paris. "Les papiers disparus, (...) rien de cela ne permettait à un fonctionnaire compréhensif et appliquant la loi de certifier que j'étais bien français. Cependant, plein de bonne volonté, il trouva le texte salvateur." M. Penso fut donc déclaré français "comme étant né de parents dont la nationalité est inconnue" (sic). "A défaut, ajoute-t-il, je me demande fichtrement bien ce que j'aurais pu être."

Chacun y va de ses mésaventures ubuesques avec l'administration. Tel Roger Kuban, qui, à l'instar de ces nombreux descendants de familles chassées d'Europe de l'Est par les pogroms, s'est vu, pour la première fois, à 60 ans, refuser un passeport - alors qu'il était titulaire depuis toujours d'une carte d'identité mentionnant sa "nationalité française" et d'une carte d'électeur. Ou Catherine Meurant-Jaworski, qui a dû prendre conseil auprès d'un avocat pour se sortir d'un guêpier administratif inextricable, les actes de naturalisation de ses parents, nés en Pologne, étant mis en doute...

"J'ai même dû prouver que je n'avais pas renié ma nationalité six mois avant ma majorité !", souligne pour sa part Nicole Dispans Guitton (courriel), née à l'étranger de parents français, à qui, à sa "grande stupéfaction", on a demandé de prouver sa nationalité "alors que, depuis 47 ans, j'ai toujours été française". Encore plus absurdes, si possible, les tribulations racontées ci-dessous par Dominique Lecomte (Kinshasa) ou Jean-Pierre et Paulette Queyroy (Marseille).

Il y a mille manières d'être français. Et ces lettres les racontent, à leur manière, humoristique ou véhémente. Toutes remercient Le Monde d'avoir mis en lumière une histoire si proche de la leur.

A deux exceptions près, qui soupçonnent l'auteur d'intentions politiques masquées. "Rien de nouveau sous le soleil", remarque Pierre Laconche (Ecully), signalant les difficultés d'un de ses collègues, il y a vingt ans, pour renouveler sa carte d'identité. De même, Renaud Delourme s'étonne : "Qu'y a-t-il de douloureux" dans le rappel de l'histoire familiale de Kristian Feigelson ? " Ce papier n'est-il pas dirigé contre le candidat de l'"ordre", le ministre de l'intérieur, sûrement responsable d'une telle situation ?"

C'est chercher une mauvaise querelle à un bon article qui ne prétendait pas créer l'actualité, mais traiter sur le fond un thème de campagne. "Je ne voulais pas dire que l'application de ces nouvelles règles, justifiée par la lutte contre la fraude, était illégale, abusive ou exorbitante, explique Anne Chemin. Je voulais raconter qu'en demandant de justifier leur nationalité à certaines personnes on réveille chez elles un passé douloureux, et que beaucoup le vivent mal." Le nombre de témoignages reçus montre que ces sentiments sont largement partagés, et justifie l'enquête.

Véronique Maurus

source : le Monde

Il y a même un candidat à la présidence qui a indiqué que la double nationalité ne devrait pas exister .... Une nationalité et c'est tout ....

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